• Un regard*

     

    AVEC LES YEUX (112)

     

    *dérangeant

     

    Je ne suis pas tellement dans une photographie cérébrale, fondée sur des idées, même si nous avons toujours besoin d'idées, d'une base sur laquelle se tenir. Je suis le genre de photographe qui s'appuie sur l'intuition, je travaille avec mon coeur et mes tripes. Je veux que ma découpe soit organique, je veux un résultat charnel. C'est ça qui m'importe.

     

    Si vous vous rendez à la Bnf-Richelieu, vous pourrez découvrir, jusque début février, hâtez-vous, une rétrospective Anders Petersen, photographe suédois qui, moi, m'a tout de suite fait songer à Diane Arbus, par sa propension à favoriser les photos de gens dans les cafés populaires, les hôpitaux (psychiatriques), les endroits clos en général, de situations intimes, pas forcément physiquement, même si c'est souvent le cas, mais intimes dans le regard, le geste, et souvent dérangeantes. 

     

    AVEC LES YEUX (112)

    Allez-y sur les coups de onze heures ! Regardez, personne ou presque : c'est l'avantage de bien des expos photo sur les expos de peinture.

     

    Je recherche les personnes et les êtres auxquels je puisse m'identifier, femmes, hommes, chiens, chats ... Tout est dans cette identification avec des êtres dont je me sens proche. Mais d'autre part je n'ai aucune certitude alors je continue.

     

    AVEC LES YEUX (112)

     

    Vous le constatez, une grande partie des photos est présentée par série "compacte" : j'y vois la volonté de tout mettre sur le même plan dans le quotidien, avec une présence âpre.

    Voici une photo représentant un condamné à mort sur une chaise électrique :

    AVEC LES YEUX (112)  

    ... comme les autres photos, les noirs sont marqués, le grain est visible. Le sujet est inhabituel, dérangeant. Je n'ai pu m'empêcher de penser à la chaise électrique décorative -à côté, et vide, faut dire, ça change la donne- de Warhol (qui en disait qu'on n'imagine pas combien de gens seraient prêts à mettre une telle oeuvre dans leur salon, pour peu qu'elle s'accorde à la couleur des rideaux).

     

    AVEC LES YEUX (112)

                                                              (pioché sur le Net)

                                            

    Ce qui m'intéresse c'est une attaque précise et acérée. Il ne s'agit pas d'expliquer quelque chose qui est sans réponse, mais de poser les questions. Plus il y a de questions et de désirs dans une prise, meilleure elle est.

     

    AVEC LES YEUX (112)

    À la fin de l'expo, un film est présenté, un peu long, et insistant avec trop de complaisance sur l'état physique de l'homme (il fume, il boit, il dort peu) au détriment de son travail ; dommage. Une chose est troublante : cet homme qui se veut proche des gens, qui les photographie dans des contextes très intimes, paraît, à l'image, dans ce film, détaché, distant, pas chaleureux.
    Il n'empêche, et j'ai plus l'impression de vous avoir rebuté qu'autre chose par mes mots, que la découverte vaut le détour. J'aime beaucoup la façon originale qu'il a de cadrer ses sujets. J'aime beaucoup qu'on cherche à transcender toute banalité, et toute laideur. Et cette photographie-là interpelle.

    Un petit topo Youtube qui vous donnera une idée :

     

     

     

     Toutes photos     © Le Krop     cliquables pour un format plus grand (et donc un plus grand confort).

     


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